L’égalité genre au Togo: Progrès et points sombres, Afrobaromètre, Janvier 2019

L’égalité genre au Togo: Progrès et points sombres, Afrobaromètre, Janvier 2019

Auteur : Hervé Akinocho

Organisation affiliée : Afrobaromètre

Type de publication : Enquête

Date de publication : Janvier 2019

Lien vers le document original

 

*Les Wathinotes sont des extraits de publications choisies par WATHI et conformes aux documents originaux. Les rapports utilisés pour l’élaboration des Wathinotes sont sélectionnés par WATHI compte tenu de leur pertinence par rapport au contexte du pays. Toutes les Wathinotes renvoient aux publications originales et intégrales qui ne sont pas hébergées par le site de WATHI, et sont destinées à promouvoir la lecture de ces documents, fruit du travail de recherche d’universitaires et d’experts.


 

Introduction

Le Togo a modernisé ces dernières années plusieurs de ces textes de lois et pris plusieurs initiatives pour la promotion de l’égalité genre dans le pays.

Ces avancées vont de l’adoption d’un nouveau code pénal plus égalitaire, d’un code nouveau foncier balayant l’ambivalence des textes coutumiers et modernes qui pénalisaient les femmes, d’une stratégie nationale d’intégration du genre dans les politiques et programmes de développement à la révision de la stratégie de lutte contre les violences basées sur le genre (VBG).

Ce nouvel arsenal juridique avec l’appui des associations et les partenaires au développement a permis de faire reculer certaines des plus graves violences faites aux femmes telles que l’excision (Ministère de l’Action Sociale, de la Promotion de la Femme, de la Protection de l’Enfant et des Personnes Agées).

Des avancées sont également obtenues dans les domaines de l’éducation des filles et de l’accès des femmes à l’emploi. Mais dans d’autres domaines les gaps ont du mal à être comblés, notamment au niveau de l’accès des femmes en politique, l’accès au foncier, et la persistance des violences physiques et sexuelles ainsi que les mariages précoces.

L’égalité d’accès à l’école: Presqu’un acquis

Parmi les 33 pays africains dont nous disposons des données, le Togo est dans le peloton de tête avec les pays comme le Libéria (98%), Madagascar (98%), Maurice (98%), la Côte d’Ivoire (97%), et la Tanzanie (97%). A contrario, les Malawites (75%) et les Mozambicains (77%) sont les moins à penser que les garçons et les filles ont les mêmes chances d’accès à l’école dans leur pays.

Ce nouvel arsenal juridique avec l’appui des associations et les partenaires au développement a permis de faire reculer certaines des plus graves violences faites aux femmes telles que l’excision (Ministère de l’Action Sociale, de la Promotion de la Femme, de la Protection de l’Enfant et des Personnes Agées)

Ainsi concernant le niveau d’instruction deux importants constats se dégagent de cette comparaison. Le premier montre que les femmes ont en général un niveau d’instruction plus bas que les hommes. Ainsi, il y a plus de femmes que d’hommes sans instructions (32% contre 13%) ou avec un niveau primaire inachevé (26% contre 19%).

Une fois passée le primaire complété, où les deux sexes ont des performances équivalentes, les hommes en proportion sont les mieux représentés pour tous les niveaux supérieurs avec respectivement 18, 2, et 5 de points de plus pour les niveaux secondaire inachevé, secondaire achevé, et universitaire.

L’égalité d’accès à l’emploi: En principe, mais pas inconditionnellement

Les populations togolaises pensent à une forte majorité (90%) que les femmes et les hommes ont aujourd’hui dans le pays les mêmes chances d’avoir un emploi rémunéré. Cette perception ne dépend pas des variables socio-démographiques que nous avons utilisés, à savoir le sexe, le milieu de résidence, la religion, et le niveau d’éducation.

Des avancées sont également obtenues dans les domaines de l’éducation des filles et de l’accès des femmes à l’emploi. Mais dans d’autres domaines les gaps ont du mal à être comblés, notamment au niveau de l’accès des femmes en politique, l’accès au foncier, et la persistance des violences physiques et sexuelles ainsi que les mariages précoces

Au Togo, près d’une personne sur trois (32%) sont pour une telle discrimination basée sur le genre, contre deux personnes sur trois (65%) qui s’y opposent. Bien que la proportion de femmes (25%) acceptant cette discrimination soit non-négligeable, elle reste bien en dessous de celle des hommes (39%).

Les personnes ayant un niveau d’éducation post-secondaire (24%) l’acceptent également moins que les autres. L’âge et le milieu de résidence n’impactent pas l’avis des Togolais sur cette question.

La gestion des ressources obtenues

Si le milieu de résidence ne semble avoir une influence sur le choix de la gestion personnelle ou non de ses revenus, par contre le sexe et la religion semble y jouer un certain rôle. Ainsi les hommes (65%) gèrent beaucoup plus seuls leurs revenus que les femmes (55%).

Au Togo, près d’une personne sur trois (32%) sont pour une telle discrimination basée sur le genre, contre deux personnes sur trois (65%) qui s’y opposent. Bien que la proportion de femmes (25%) acceptant cette discrimination soit non-négligeable, elle reste bien en dessous de celle des hommes (39%)

Les proportions gérant personnellement leurs ressources sont respectivement de 59%, 62%, et 65% chez les chrétiens, les musulmans, et les adhérents d’autres religions. Enfin, lorsque désagrège par niveau d’éducation, ce sont les personnes sans éducation formelle (66%) qui ont plus tendance à gérer elles-mêmes leurs revenus.

Gestion et éducation des enfants

La femme au Togo a un rôle clé dans la gestion quotidienne de la famille et l’éducation des enfants. Ce rôle est confirmé par près de deux Togolais sur trois (65%) qui trouvent qu’en général, une famille vit mieux lorsque c’est une femme qui porte la responsabilité principale quant à sa gestion et à l’encadrement des enfants. Seul 27% d’entre eux sont en désaccord avec cette affirmation.

L’égalité d’accès en politique

En comparaison des 33 autres pays enquêtés, le Togo se retrouve parmi les pays les plus à la pointe du soutien à l’accès des femmes en politique, après le Cap vert (88%) et le Gabon (87%). Les moins favorables à cette égalité d’accès sont le Niger et le Nigéria avec seulement 54% de leurs populations, ainsi que le Soudan avec 49%. Il faut noter qu’en moyenne près de trois personnes interviewées sur quatre (73%) sont en faveur de cette égalité d’accès en politique.

Les personnes ayant un niveau d’éducation post-secondaire (24%) l’acceptent également moins que les autres. L’âge et le milieu de résidence n’impactent pas l’avis des Togolais sur cette question

Au vu des chiffres précédents, on dirait que l’accès des femmes à la politique semble presqu’universel au Togo, mais la réalité est bien moins reluisante.

Même si la coalition des 14 partis de l’opposition en discussion pour la mise en place des réformes constitutionnelles et institutionnelles est dirigée par une femme, elles sont assez peu présentes en général en politique au Togo. Cette sous-représentativité quand il s’agit du pouvoir législatif est assez symptomatique des difficultés à faire avancer cet agenda dans la sphère publique.

Discriminations basées sur le genre

Au Togo, 12% de la population déclarent avoir été, au cours de l’année dernière, l’objet de discrimination ou d’harcèlement sur la base de leur sexe. Si les hommes (10%) sont touchés par le phénomène, il y a légèrement plus de femmes (14%) qui en sont victimes. Le phénomène est présent à 14% en milieu urbain contre 11% en milieu rural.

Violence physique envers les femmes

Au-delà des discriminations et du harcèlement basé sur le genre, la violence physique est l’une des pires injustices qui touchent les femmes. Elle a sur elle aussi bien des conséquences visibles que des conséquences psychologiques.

Au Togo, bien qu’une majorité (63%) de personnes rejettent ce type de violence, la proportion de personne la justifiant est très préoccupante. En effet, plus du tiers des Togolais trouvent qu’il est « parfois » (28%) ou « toujours » (8%) justifié de battre sa femme.

La femme au Togo a un rôle clé dans la gestion quotidienne de la famille et l’éducation des enfants. Ce rôle est confirmé par près de deux Togolais sur trois (65%) qui trouvent qu’en général, une famille vit mieux lorsque c’est une femme qui porte la responsabilité principale quant à sa gestion et à l’encadrement des enfants. Seul 27% d’entre eux sont en désaccord avec cette affirmation

L’une des barrières à faire tomber dans la lutte contre les violences basées sur le genre est que 29% des femmes elles-mêmes trouveraient que cette violence peut être justifiée. En regardant les caractéristiques de ces femmes qui justifient la violence de leurs maris, celles ayant été à l’école (primaire (30%) ou secondaire/post-secondaire (32%)) le font plus que celles qui n’ont reçu aucune éducation formelle (21%). De plus, les régions ne sont pas égales face à l’acceptation de la violence des maris.

Le problème de la violence au Togo va bien au-delà de son acceptation par une frange non-négligeable de la population, car elle est aussi accompagnée d’autres formes de violences dont les violences sexuelles.

Selon l’EDST III, le tiers (32%) des femmes togolaises ont au moins une fois été victimes de violences soit physiques soit sexuelles depuis qu’elles ont eu 15 ans, dont 22% ont subi des violences physiques, 7% des violences sexuelles aussi bien que physiques, et 3% des violences sexuelles seulement.

Conclusion

Sur l’accès des filles à l’école, les données vont dans le même sens que les aspirations des Togolais d’un accès universel et non-différentié selon le sexe. Si des différences persistent au niveau de l’accès à l’emploi, ces dernières ne contredisent pas les aspirations de la grande majorité des Togolais d’un accès équitable des femmes au marché du travail.

Des efforts sont néanmoins à faire pour assurer un plus grand accès aux postes qualifiés et une plus grande présence des femmes dans le secteur formel. Bien que les Togolaises aient une assez grande liberté dans la gestion des revenus que leur procurent leurs activités, il faut aussi s’assurer que les femmes ne pâtissent pas particulièrement plus que les hommes des conjonctures difficiles du secteur de l’emploi.

Le second secteur regroupe l’accès en politique et foncier des femmes. En effet, la plupart des Togolais sont des défenseurs de l’accès des femmes à des postes électifs et aussi de leur accès à la terre. Mais la réalité s’avère assez loin du compte, bien qu’il y ait eu des avancées dans les textes. Les postes politiques sont encore très majoritairement occupés par des hommes, et très peu de femmes sont propriétaires de terre seules ou même avec quelqu’un d’autre.

 

Commenter