République togolaise – Evaluation rapide de l’état de préparation au commerce électronique, CNUCED

République togolaise – Evaluation rapide de l’état de préparation au commerce électronique, CNUCED

Auteur : Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED)

Type de publication : Rapport

Date de publication : 2018

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*Les Wathinotes sont des extraits de publications choisies par WATHI et conformes aux documents originaux. Les rapports utilisés pour l’élaboration des Wathinotes sont sélectionnés par WATHI compte tenu de leur pertinence par rapport au contexte du pays. Toutes les Wathinotes renvoient aux publications originales et intégrales qui ne sont pas hébergées par le site de WATHI, et sont destinées à promouvoir la lecture de ces documents, fruit du travail de recherche d’universitaires et d’experts.

Évaluation de l’État de preparation au commerce électronique et formulation des strategies

Le Gouvernement togolais a placé le développement des TIC au centre des priorités nationales à travers l’adoption de deux déclarations de politique sectorielle consécutives. A la suite des succès enregistrés au cours des dernières années dans le domaine des TIC, la seconde feuille de route a été adoptée pour la période 2018-2022. Cependant, le commerce électronique ne dispose pas jusqu’à présent d’une politique dédiée, même si son potentiel a été mis en évidence dans la récente mise à jour de l’Étude diagnostique pour l’intégration du commerce (EDIC) menée au Togo.

Le commerce électronique suscite néanmoins un vif intérêt de la part des autorités, car il prend place à l’intersection entre la volonté de renforcer les TIC et celle de favoriser le commerce et entrepreneuriat, des thématiques présentes dans l’ensemble des outils politiques de développement du Togo. Le présent exercice d’évaluation s’inscrit donc parfaitement dans cette volonté et pourra, par la suite, servir de base à tout développement stratégique du commerce électronique. En ce qui concerne la coordination entre les secteurs public et privé et le dialogue public-privé, ils gagneraient à être étendus au commerce électronique.

Le classement du Togo dans divers indices internationaux démontre une performance relativement moyenne de l’ensemble du secteur des TIC, même si elle apparaît en constante amélioration. Deux classements sont particulièrement importants à prendre en considération pour situer le pays au niveau international :

– L’indice du commerce électronique B2C de la CNUCED : le Togo y est classé 111e sur 144 pays en 2017. Il devance ainsi des compétiteurs régionaux tels que le Sénégal et le Bénin. Ce score est également en nette progression depuis quelques années (le Togo occupait la 123e place en 2015) témoignant des avancées faites dans les domaines couverts par l’indice, qui sont les suivants : la pénétration dans l’utilisation de l’Internet, le nombre de serveurs sécurisés par million d’habitants, la pénétration dans l’utilisation de cartes de crédit, et la fiabilité des services postaux.

– L’indice de développement des TIC de l’Union internationale des télécommunications (UIT) : classé 156e sur 176 pays, le Togo a une moins bonne performance que celle de ses voisins (Sénégal ou Mali). L’indice englobe entre autres des sous-indicateurs liés à l’infrastructure des TIC, au prix des services TIC et à leur caractère abordable, ainsi qu’aux compétences existantes dans le domaine des TIC au niveau national.

Infrastructure TIC et services

Dans la sous-région, le Togo se classe parmi les premiers au regard de l’infrastructure de connectivité Internet, tant au niveau de l’Internet à haut débit fixe, qu’au niveau de la pénétration de l’Internet mobile, même si la qualité des services offerts n’est pas stable et les prix pratiqués sont relativement élevés. Le marché des Fournisseurs d’Accès Internet (FAI) fixe a considérablement évolué sur les deux dernières années. Deux opérateurs se partagent à présent le marché : le fournisseur public, TOGOCOM, qui domine largement avec 90.5% de parts, et CAFE Informatique & Télécommunications. Le marché des FAI est récemment devenu plus concurrentiel avec l’arrivée de nouveaux opérateurs en 2018 : Teolis SA et Group Vivandi Africa (GVA) Togo. Le développement de leurs produits est en cours. Le marché de la connectivité mobile, réseau et Internet a lui aussi connu un développement important sur les deux dernières années.

Dans la sous-région, le Togo se classe parmi les premiers au regard de l’infrastructure de connectivité Internet, tant au niveau de l’Internet à haut débit fixe, qu’au niveau de la pénétration de l’Internet mobile … 

Malgré ces avancées, des efforts restent à faire sur la qualité des services au regard de l’avis des consommateurs. De nombreuses infrastructures sont toutefois mises en place pour combler ces lacunes (le réseau E-gouvernement, le programme WARCIP, le réseau Wifi Campus, le réseau Wifi public ou encore le projet E-Village). En matière d’accès à l’électricité, deux problèmes persistent : la couverture géographique et la qualité du raccordement.

Logistique du commerce et facilitation des échanges

Le Togo est deuxième dans la région selon l’indice de fiabilité des services postaux ainsi que dans la facilité des envois internationaux. Cependant, l’aspect « livraison et logistique » a unanimement été signalé par les parties prenantes au commerce électronique comme l’un des principaux freins à leur activité. Les services postaux sont relativement bien développés au Togo, avec une bonne répartition des services, mais l’adressage reste un problème majeur et la rapidité des livraisons varie grandement entre la capitale, l’international, et les régions.

En matière d’accès à l’électricité, deux problèmes persistent : la couverture géographique et la qualité du raccordement

Le développement des plateformes de commerce électronique est également entravé par le fait que ces entreprises ne sous-traitent pas leur service de livraison. Pour ce qui est de l’environnement des affaires et de la facilitation des échanges internationaux, le rapport Doing Business 2018 enregistre un recul d’une place du Togo, malgré un certain nombre d’avancées significatives, notamment dans la création d’entreprises, l’obtention du permis de construire et le raccordement à l’électricité. Le Togo s’est en effet doté d’une plateforme électronique qui interconnecte plusieurs agences, aussi bien pour les procédures d’importation et d’exportation que pour les paiements y afférant, ainsi que d’une plateforme de facilitation de la création d’entreprises à travers la mise en place d’un Centre des Formalités des Entreprises (CFE), un guichet unique en ligne. Pour le transport routier, le Togo dispose d’un ensemble de grands réseaux stratégiques qui sont dans l’ensemble en bon état, notamment l’axe littoral le raccordant au Bénin et au Ghana.

Solution de paiement 

La BCEAO fournit le cadre réglementaire sur la monnaie électronique, y compris sur la protection des détenteurs. Le dispositif réglementaire mis en place par la BCEAO devrait rendre les établissements non bancaires (SFD) plus autonomes vis-à-vis des banques. Cependant, les parties prenantes au Togo ont signalé une réglementation extrêmement rigide au niveau de la BCEAO concernant les comptes en devises étrangères, rendant difficiles les activités d’export pour les commerçants en ligne. L’approfondissement de la réglementation dans le sens de l’interopérabilité des services financiers proposés par les différents opérateurs est actuellement en préparation par la BCEAO et il est prévu qu’elle entre en vigueur en 2020.

Cadre juridique et réglementaire

Le cadre juridique relatif au commerce électronique vient d’être révisé et mis à niveau avec la nouvelle loi sur les transactions électroniques (LTE), adoptée en 2017 et dont le décret d’application a été promulgué en 2018. Le Conseil des ministres a également promulgué, en avril 2018, un décret relatif au service universel des communications électroniques intégrant notamment l’accès à l’Internet à un débit minimal sur toute l’étendue du territoire national.

Une loi relative à la protection des données à caractère personnel ainsi qu’une loi sur la cybersécurité seront prochainement proposées à l’Assemblée nationale pour adoption 

Une loi relative à la protection des données à caractère personnel ainsi qu’une loi sur la cybersécurité seront prochainement proposées à l’Assemblée nationale pour adoption. Malgré ces nombreuses avancées, il est apparu au cours des consultations avec les parties prenantes au commerce électronique qu’il existe un manque évident de connaissances sur le cadre juridique existant et son contenu. De plus, des lacunes persistent dans le cadre juridique actuel. La protection des consommateurs ne fait pas l’objet de régulations spécifiques, mais les nouvelles dispositions de la LTE donnent un cadre législatif et réglementaire suffisant.

Développement des competences pour le commerce électronique

Même si le manque de compétences n’est pas considéré, comme la principale entrave au développement du commerce électronique ce pourrait être le cas avec la croissance du secteur. En effet, les lacunes des formations TIC par rapport aux dernières avancées technologiques (langages de développement web, cybersécurité, etc.), les lents mécanismes de mise à jour des formations ainsi que le manque de consultation du secteur privé creusent l’écart entre le système éducatif et le marché du travail.

Dans le domaine des TIC, les formations disponibles ont deux principaux fournisseurs : le service public et surtout, les institutions privées. Ni l’un ni les autres ne dispensent de cours spécialisés dans le domaine du commerce électronique. Mais ce sont les méthodes d’enseignement, dépassées et non accompagnées d’expériences pratiques en entreprise, qui apparaissent comme le principal problème, plus important même que la qualité des connaissances techniques enseignées. Au cours des consultations menées au Togo, les entreprises se sont plaintes du manque de compétences générales et relationnelles (soft skills) de leurs nouveaux employés, plus que de leurs compétences techniques. Les connaissances limitées des consommateurs sur le commerce électronique constituent également un frein majeur à son développement.

Accès au financement

Malgré un secteur bancaire développé, l’offre de services est limitée et les prix des services élevés. De plus, le secteur bancaire ne propose pas de services adaptés aux besoins des PME/TPE dans le domaine technologique. Une des principales contraintes des banques togolaises est leur retard dans le domaine de l’innovation, tant au niveau de leurs services financiers qu’en termes technologiques. Comme ailleurs dans la sous-région, le taux de bancarisation reste faible.

Le secteur de la microfinance se développe au Togo, mais l’activité des institutions de microfinance (IMF) reste concentrée et elles font face à des problèmes structurels. En dehors des systèmes de financement classiques, les institutions d’appui financier aux PME, surtout celles spécifiquement dédiées au secteur des technologies et du commerce électronique, sont extrêmement rares. Les sociétés de capital-risque sont quant à elles inexistantes au Togo, du fait notamment d’un régime complexe pour les Investissements directs étrangers (IDE).

Cette évaluation de l’état de préparation du Togo au commerce électronique montre bien qu’il s’agit d’un secteur naissant. Toutefois, ce secteur bénéficie d’un contexte national favorable qui pourrait accélérer les réformes requises. Le développement du commerce électronique se heurte à de nombreux obstacles : manque d’infrastructures, de solutions de paiement, de logistique et d’encadrement des modes de livraison ; déficience en termes de cybersécurité. Afin de stimuler le développement du commerce électronique, le Togo devra donc se focaliser sur les fondamentaux et concentrer ses efforts sur les points suivants :

  • Amélioration du cadre de gouvernance du secteur (cadre stratégique et de coordination institutionnelle) et de sa réputation auprès de la population ;
  • Amélioration du cadre de concurrence et de transparence des FAI ;
  • Renforcement des réseaux de livraison à l’intérieur du pays ;
  • Libéralisation de l’accès aux API des opérateurs et diversification des services financiers pour les paiements conventionnels en ligne ;
  • Renforcement du cadre juridique pour la cybersécurité ;
  • Ajustement de l’offre de formation dans les domaines des TIC et du commerce électronique aux besoins des entreprises ;
  • Développement d’une offre de financement (incubateurs, capital-risque, « Business Angels », etc.) spécifiquement dédiée aux startups technologiques.